Semaine 32/18 – Suisse – Imposition privilégiée des bénéfices d’aliénation d’immeubles agricoles et sylvicoles

Le contentieux faisant l’objet de l’arrêt 2C_217/2018, rendu par le Tribunal fédéral le 17 juillet, porte sur la nature juridique de deux parcelles, dont dépend l’imposition du bénéfice provenant de leur aliénation au regard de l’article 8 alinéa 1 en relation avec l’article 12 LHID :  s’il s’agit d’immeubles agricoles ou sylvicoles, le bénéfice à la vente n’est imposable que dans la mesure où le produit de celle-ci est supérieur aux dépenses d’investissement et dans ce cas, il est soumis à l’impôt sur les gains immobiliers ; s’il tel n’est pas le cas, l’exclusion de l’article 8 alinéa 1 LHID ne s’applique pas et le bénéfice de l’aliénation est intégré au revenu imposable. (Voir aussi notre blog de la semaine 44/17).

En ce qui concerne l’une des parcelles, l’instance inférieure avait appréhendé les faits au regard de l’article 2 alinéa 2 lettre a. LDFR, qui pose trois conditions d’application : (i) il s’agit d’immeubles ou parties d’immeubles comprenant des bâtiments ou des installations agricoles, (ii) ceux-ci sont situés dans une zone à bâtir, et (iii) font partie d’une entreprise agricole. Cette parcelle se trouvant entièrement dans une zone à bâtir, les propriétaires avaient dû, selon les engagements pris dans le contrat de vente, démonter les constructions agricoles avant le transfert, les acquéreurs de leur part n’ayant pas l’intention de développer une activité agricole.

Les diverses dispositions en matière de droit rural ont pour finalité commune de maintenir en mains des exploitations agricoles la propriété du sol agricole, qui représente un facteur de production déterminant. Toutefois, tout cela ne signifie pas que l’imposition privilégiée de l’article 8 alinéa 1 en relation avec l’article 12 alinéa 1 LHID doit nécessairement être écartée dans les cas où le terrain qui jusque-là bénéficiait du droit rural perdait son statut. Ainsi, la question s’est posée de savoir si ce statut devait être considéré rétrospectivement ou prospectivement. Dans une approche prospective, l’immeuble perdrait son statut rural et le bénéfice d’aliénation tomberait dans le revenu imposable.

Invoquant également l’article 18 alinéa 4 LIFD, le tribunal a conclu que la disqualification irrévocable pour l’avenir d’un immeuble rural ne faisait pas obstacle à l’imposition privilégiée du bénéfice d’aliénation; en d’autres termes, il a adopté l’approche rétrospective. Il a toutefois rejeté le recours faute de preuves de l’utilisation agricole de l’immeuble jusqu’au moment de la vente.

Quant à la seconde parcelle, elle avait fait l’objet d’un transfert à la fortune privée, valant réalisation systématique et déclenchant à ce titre l’impôt sur le revenu.