Semaine 30/18 – Suisse – Objet de contestation/objet de litige ; déductibilité des intérêts en relation avec un rappel d’impôt

Les deux points ci-dessus sont au centre de l’arrêt 2C_258/2017 du Tribunal fédéral du 2 juillet.

La distinction entre l’objet de la contestation et l’objet du litige est une question qui relève de la procédure. En procédure juridictionnelle administrative, ne peuvent être examinés et jugés, en principe, que les rapports juridiques à propos desquels l’autorité administrative compétente s’est prononcée d’une manière qui la lie sous la forme de décision.

La décision détermine ainsi l’objet de la contestation, qui peut être différé en justice par voie de recours ; le juge n’entre pas en matière, sauf exception, sur les conclusions qui vont au-delà de l’objet de la contestation. L’objet du litige dans la procédure de recours est le rapport juridique réglé dans la décision attaquée, dans la mesure où – d’après les conclusions du recours – il est remis en question par la recourante. Ainsi, lorsque la décision administrative est attaquée dans son ensemble, les deux objets sont identiques. Dans le cas contraire, les rapports juridiques non litigieux sont certes compris dans l’objet de la contestation, mais non pas dans l’objet du litige ; l’objet du litige peut donc être réduit par rapport à l’objet de la contestation, mais ne peut, sauf exceptions, s’étendre au-delà de celui-ci. Ni le principe de la libre appréciation des faits (y compris le cas échéant de nova) ni la reformatio in pejus ne sont en contradiction avec ce principe.

Le Tribunal fédéral a débouté l’Administration fiscale cantonale de canton de Genève, dont la Cour de justice avait rejeté la demande de se prononcer sur l’existence de nouveaux comptes non déclarés du contribuable en les intégrant dans la procédure de rappel d’impôt en cours. Un tel élargissement de la procédure aurait représenté une extension infondée de l’objet de la contestation. Le tribunal a aussi souligné que ce cas se différenciait de celui faisant l’objet de l’arrêt 2C_393/2015 du 26 janvier 2016, où il avait considéré que le fait d’examiner un litige sous l’angle du rappel d’impôt, alors que les autorités inférieures n’avaient pas envisagé une telle possibilité, ne constituait pas une extension inadmissible de la procédure, mais l’application d’une approche juridique nouvelle aux mêmes éléments de fait.

La question de fond portait, elle, sur le point de départ des intérêts relatifs aux impôts faisant l’objet d’un rappel. Le tribunal s’est d’abord demandé, bien que cette question ne fût pas contestée, si les intérêts sur les rappels d’impôt constituaient des intérêts passifs déductibles en vertu de l’article 33 alinéa 1 lettre a. LIFD. Suivant la doctrine, il a répondu par l’affirmative, car aussi particuliers qu’ils soient, ces intérêts sont en lien avec la dette pécuniaire découlant du rappel d’impôt. Puis, il s’est penché sur la question de la période de leur déductibilité: l’instance inférieure s’étant référée à leur point de départ, alors que l’autorité de taxation préconisait leur échéance. Il a jugé que, sous l’angle de l’étanchéité des exercices fiscaux, il n’était pas insoutenable, y compris en doit fédéral dans le silence de la loi, d’en admettre la déductibilité, tant pour l’impôt sur le revenu que pour l’impôt cantonal sur la fortune, pour chacune des années sur lesquelles portent les rappels d’impôt, dès leur naissance et non pas dès qu’ils sont fixés par une décision.