Semaine 12/16 – Suisse – Limites à l’assistance administrative posées par le droit interne

Dans l’arrêt 2C_594/2015 du 1er mars, le Tribunal fédéral a admis, à titre préliminaire, que la question de savoir dans quelle mesure le droit interne suisse permet la transmission des documents concernant des sociétés suisses liées au contribuable à l’étranger visé par une demande d’assistance administrative internationale (sous l’égide de la CDI CH, en l’espèce) constituait bien un cas particulièrement important au sens de l’article 84 alinéa 2 LTF.

Suivant la recourante, l’Administration fédérale des contributions, le Tribunal fédéral a autorisé la transmission d’informations concernant l’activité, le nombre d’employés et les locaux de la société que l’instance inférieure avait refusée.

Le cœur de la question réside dans les différences entre le devoir de collaboration du contribuable (articles 123 et 126 LIFD), d’une part, et celui de certains tiers (articles 127 à 129 LIFD), d’autre part. Celui du contribuable s’étend à la fourniture de renseignements relevants pour la taxation de ses partenaires d’affaires, à la condition que cela puisse concerner sa propre taxation et pour autant que le but principal de la demande de l’autorité fiscale concerne la situation fiscale de ses partenaires en affaires. En revanche, les renseignements détenus par des tiers et qui ne sont pas susceptibles d’affecter leur propre taxation ne peuvent être exigés que dans les limites fixées par les articles 127 à 129 LIFD.

Le tribunal a jugé que c’est à tort que l’instance inférieure avait conclu que sous l’angle du droit interne suisse, l’obligation de collaboration de la société tombait sous le coup des articles 127 à 129 LIFD. Au contraire, les renseignements demandés à la société constituent des indices propres à déterminer si sa création procède, ou non, de la mise en place d’une structure artificielle, auquel cas la taxation de la société en serait affectée dans la mesure où les revenus qui lui ont été attribués artificiellement le seraient désormais directement à son actionnaire et en vertu du droit interne suisse, l’obligation de communiquer les informations découlerait alors de l’article 126 LIFD.

Dans ce contexte, le tribunal a rappelé que la remise en cause de l’affectation d’un revenu à une personne morale pouvait intervenir indépendamment d’une situation constitutive de distribution dissimulée de bénéfices ou d’évasion fiscale. L’autorité de taxation est en effet fondée à remettre en cause l’attribution d’un revenu afférent à une prestation de conseil à une société dont l’unique actionnaire est la personne qui a fourni cette prestation, dès lors que ladite personne échoue à prouver par titre que le mandat a bien été exécuté, comme elle le soutient, par le truchement de la société. C’est l’occasion de rappeler que la réattribution d’un revenu s’associe soit à une évasion fiscale soit à une soustraction d’impôt.