Semaine 1/19 – Suisse – Responsabilité solidaire des personnes chargées de l’administration et de la liquidation d’une société pour le paiement des impôts dus par celle-ci

La liquidation de fait d’une société suffit-elle à engager la responsabilité solidaire de son administrateur pour le paiement de ses impôts directs? C’est à cette question que le Tribunal fédéral a répondu pour la première fois, et par l’affirmative, dans l’arrêt 2C_607/2017 du 10 décembre.

Le recourant, actionnaire et administrateur unique d’une société immobilière, avait fait vendre à celle-ci treize de ses quinze immeubles en à peine sept mois après l’avoir achetée, puis l’a revendue avec les deux immeubles restants et un compte débiteur actionnaire important (au début de ses fonctions pourtant largement créancier), et a démissionné en même temps de ses fonctions d’administrateur. Les deux immeubles restants ont été eux-aussi vendus par la suite et, quelques années plus tard, n’ayant plus ni administrateurs ni adresse, la société a été dissoute et liquidée par décision judiciaire. Faute d’actifs, la faillite a été suspendue et la société a finalement été radiée d’office du registre du commerce.

La liquidation de fait est définie par une jurisprudence abondante, rendue sous l’égide de l’article 15 LIA. Il en va de même des personnes chargées de la liquidation. Leurs caractéristiques se retrouvaient dans le comportement du recourant en tant qu’organe de la société. Ainsi, le tribunal a jugé que l’article 55 LIFD devait aussi s’appliquer aux cas de liquidation de fait. Il a d’ailleurs clairement indiqué que telle devait être aussi la pratique au regard de l’article 15 LTVA.

A la différence de l’article 15 LIA, la responsabilité solidaire de l’article 55 LIFD n’est pas limitée dans le temps, de sorte que le liquidateur répond aussi des dettes fiscales de la société antérieures à son entrée en fonctions. En revanche, la limite quantitative de la responsabilité est la même dans les deux lois, soit le produit net de la liquidation, c’est-à-dire le montant du patrimoine social au début de la liquidation, que le tribunal a fixé en l’espèce à l’entrée en fonctions du recourant.

Pour ce qui est de la preuve libératoire, le tribunal a confirmé qu’il convenait d’interpréter l’article 55 alinéa 1 LIFD de manière moins restrictive que l’article 15 alinéa 2 LIA. Il a jugé que la constitution d’une provision pour impôt devait être considérée comme étant une mesure ayant pour effet de réduire la responsabilité du recourant quand bien même la société ne s’était finalement pas acquittée des impôts provisionnés, car le recourant avait démissionné dans l’intervalle.

Sur le plan cantonal, c’est l’article 8 alinéa 1 LIPM/GE, avec la même teneur que l’article 55 alinéa 1 LIFD, qui avait été appliqué.