Semaine 37/16 – Suisse – Impôt confiscatoire ; Imposition séparée des époux

Les faits sous-jacents à l’arrêt 2C_837/2015 que le Tribunal fédéral a rendu le 23 août se résument ainsi :

– bien que l’épouse, domiciliée à Genève, vécût indépendamment de son mari installé à Zurich, sans que les conditions d’une séparation fiscale eussent été remplies, chacun des époux était taxé séparément aux fins de l’ICC en vertu d’un accord que l’épouse avait avec l’Administration fiscale cantonale, alors qu’en matière d’IFD, le couple était imposé, en tant que tel, à Zurich ;

– au décès du mari, sa veuve a fait une dénonciation spontanée d’éléments qu’elle avait omis de porter dans sa déclaration d’impôt à Genève ;

– les bordereaux de rappel, dépassant largement 60% du revenu net imposable, soit le « bouclier fiscal », ont été considérés comme confiscatoires par la veuve et ont été à l’origine de la procédure qui a abouti à l’arrêt du Tribunal fédéral.

Le tribunal a rejeté le recours en précisant que pour qu’une imposition fût confiscatoire, le taux de l’impôt exprimé en pourcent n’était pas seul décisif et qu’il fallait examiner la charge que représente l’imposition sur une assez longue période, en faisant abstraction des circonstances extraordinaires. Plus précisément, il a pris en compte la situation fiscale globale des époux et non pas les seuls éléments sur lesquels la recourante était imposée à Genève au titre des ICC. La capacité économique de celle-ci ne pouvait être déterminée sans prendre en considération la communauté qu’elle formait avec son conjoint.

A titre de comparaison, le tribunal a rappelé que dans le cas où la fortune ne produit que peu ou pas de rendement, l’imposition n’est pas confiscatoire si le contribuable renonce volontairement à un rendement suffisant pour des raisons familiales ou dans l’expectative d’une réalisation future bien supérieure aux revenus de la fortune. Il avait en revanche admis le caractère confiscatoire d’une imposition dans le cas d’une rente viagère constituée par disposition pour cause de mort en faveur d’une personne de condition modeste et soumise cumulativement à l’impôt sur les successions (pour le capital) et à l’ impôt sur le revenu (pour les arrérages) ; compte tenu de la capacité contributive limitée de la contribuable dans ce cas, la charge globale représentait 55% des rentes mensuelles.

Tout en la relevant au passage, le tribunal n’a pas approfondi la question de savoir comment le fisc genevois avait pu, en vertu d’un accord fiscal, décider d’un pouvoir d’assujettissement pour une imposition séparée en matière d’ICC, alors que les conditions d’une telle imposition, qui font d’ailleurs l’objet du § 1.3 de la circulaire n° 30 du 21 décembre 2010 de l’Administration fédérale des contributions, n’étaient pas remplies.