Semaine 37/16 – Suisse – La portée de «l’entrepreneurialité » en relation avec la déduction de l’impôt préalable

Dans le cadre de l’arrêt 2C_1115/2014 rendu par le Tribunal fédéral le 29 août, la question litigieuse portait sur le dégrèvement ultérieur de l’impôt préalable selon l’article 32 LTVA, en relation avec des œuvres d’art achetées par la recourante, société déployant une activité mixte de holding et de centrale d’achat. Ces œuvres ornaient ses locaux et étaient aussi prêtées gracieusement à la même fin aux sociétés-filles. Seules les visites de groupes lors d’expositions occasionnelles au siège social étaient payantes.

L’intérêt de cet arrêt réside :

a) sur le plan de la procédure, dans le rappel qu’aucun fait nouveau ni aucune preuve formelle ne peut être présenté devant le Tribunal fédéral, à moins de résulter de la décision de l’autorité inférieure (art. 99 al. 1 LTF). Dans le cas d’espèce, les faits notoirement connus mis en avant par l’Administration fédérale des contributions (extraits de sites internet) ne pouvaient être exclus comme étant des faits nouveaux.

b) sur le fond :

– les dispositions de l’article 32 LTVA sont applicables, en vertu de l’article 113 alinéa 2 LTVA, également aux prestations pour lesquelles le droit à la déduction à l’impôt préalable n’existait pas avant l’entrée en vigueur de la loi ;

– pour la déduction de l’impôt préalable, il suffit que les prestations ou les livraisons que cet impôt a grevées, rentrent dans l’activité entrepreneuriale de l’assujetti dans son ensemble. Il n’est donc pas nécessaire de chercher à rattacher chaque prestation ou livraison acquise et grevée de l’impôt à une prestation ou livraison correspondante faite par l’assujetti ;

– la mise à disposition des œuvres d’art s’inscrit ici dans un contexte économique et tombe dans le cadre de l’activité entrepreneuriale de l’assujetti. Aussi constitue-t-elle  une livraison imposable (art. 21 al. 2 ch. 16 LTVA a contrario). Ce cas est donc à distinguer de celui du mécénat où un propriétaire met ses œuvres gracieusement à la disposition d’un musée ;

– le tribunal dresse un parallèle entre les charges justifiées par l’usage commercial, selon les articles 58 alinéa 1 lettre b. et 59 alinéa 1 LIFD, d’une part, et l’article 28 alinéa 1 LTVA, d’autre part, en concluant que la marge de séparation est très étroite et que dans les deux cas les organes sociaux disposent d’un grand pouvoir d’appréciation, quantitativement et qualitativement ;

– le caractère entrepreneurial de la collection découle du principe de l’unité de l’entreprise selon l’article 10 alinéa 1 LTVA, indépendamment de l’absence de rémunération pour sa mise à disposition à des personnes proches.

La déduction de l’impôt préalable étant admise, le recours a abouti.