Semaine 39 – Suisse – Entraide administrative refusée en raison de données volées

Dans son arrêt du 15 septembre (A-6843/2014), le Tribunal administratif fédéral s’est exprimé de manière très claire sur un sujet d’actualité celui de l’utilisation de données obtenues de manière illicite.

Après avoir rappelé les conditions matérielles et formelles régissant l’assistance administrative, en l’espèce sous la CDI CH-F, et la portée de la LAAF en tant que loi d’exécution, il a précisé qu’en application de la convention, les informations ne peuvent être obtenues et transmises entre les Etats que si elles sont susceptibles de l’être selon le droit et la pratique administrative des deux Etats. Puis, il a précisé que l’utilisation de preuves obtenues illicitement est, en principe, constitutionnellement prohibée en Suisse au regard de l’article 29 Cst. Il ne saurait être question de contraindre la Suisse, par la voie de l’assistance administrative internationale, à diligenter des démarches sur la base de données volées, ce qui revient à amener à violer le droit suisse. Enfin, le tribunal a renvoyé à la jurisprudence du Conseil constitutionnel français déclarant inconstitutionnelles, pour des motifs analogues, certaines dispositions de la loi relative à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière (articles 37 et 39 de cette loi).

Sur le plan de la procédure, il a été précisé que les décisions relatives à l’exécution d’une demande d’entraide sont de nature administrative et ne sont pas, à la différence d’un jugement civil ou pénal, revêtues de la force de la chose jugée. L’Etat requérant ne peut certes pas revenir à la charge pour les mêmes faits et motifs, en demandant les mêmes mesures, mais rien ne l’empêche de compléter ou de réitérer sa demande en se fondant sur des faits nouveaux ou un changement de législation, de requérir des mesures nouvelles, ou encore de demander à l’Etat requis de statuer sur des points laissés indécis dans le cadre dune décision précédente.

Il convient de rappeler, en relation avec cette jurisprudence, la révision en cours de la LAAF, précisément sur l’article 7 c dont l’énoncé “elle viole le principe de la bonne foi, notamment lorsqu’elle se fonde sur des renseignements obtenus par des actes punissables au regard du droit suisse” deviendra “elle viole le principe de la bonne foi, notamment lorsqu’elle se fonde sur des renseignements que l’Etat requérant a obtenus à la suite d’actes punissables au regard du droit suisse et par un comportement actif en dehors d’une procédure d’assistance administrative”. La future jurisprudence suisse s’en trouvera certes plus nuancée. A lire le rapport explicatif du Conseil fédéral, il est clair que ce changement est dicté par le Forum mondial sur la transparence et l’échange de renseignements à des fins fiscales.

Voir aussi notre communication du 9 septembre sur la Modification de la LAAF concernant l’utilisation de données volées.