Semaine 2/16 – France – Prélèvement de contributions sociales auprès de non-résidents, propriétaires immobiliers en France

D’aucuns se souviennent peut-être que lorsque, par la loi des finances du 29 décembre 1982, le gouvernement français avait introduit une taxe annuelle de 3% sur la valeur vénale des immeubles possédés en France par des personnes morales (en introduisant les articles 990 D à 990 F CGI), une course contre la montre de plusieurs années s’était engagée, où les succès des recourants devant les tribunaux avaient été systématiquement suivis de nouvelles modifications législatives introduites par le gouvernement pour s’imposer.

Ce qui vient de se passer avec le prélèvement de contributions sociales auprès de non-résidents, propriétaires immobiliers en France, est le fruit d’une créativité similaire de la part de Bercy.

Pour rappel :

  • une contribution de 15,5% sur les revenus et gains immobiliers français des non-résidents a été introduite en 2012,
  • la Cour de justice de l’Union européenne a rendu le 26 février 2015 un arrêt jugeant la législation française comme contraire au droit européen (voir notre blog semaine 10),
  • en conséquence, le Conseil d’Etat a accordé la restitution des contributions sociales ainsi collectées aux propriétaires qui les avaient acquittées (voir notre blog semaine 33).

Afin de contrer ces deux jurisprudences, le gouvernement français a proposé de faire verser les contributions ainsi prélevées au Fonds national de solidarité vieillesse et à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, ces institutions ne dépendant pas du système de sécurité sociale. Cela revient à dire que les non-résidents et ceux qui ne sont pas affiliés à la Sécurité sociale sont redevables des charges sociales sur les revenus et gains immobiliers en question comme avant l’arrêt du 26 février. Comme le Ministre du budget l’a reconnu lui-même, « dire qu’il est d’une solidité juridique totale serait exagéré ».

Saisi du problème, le Conseil constitutionnel vient de se déterminer comme suit dans sa décision N° 2015-723 DC du 17 décembre 2015 : « … il n’appartient pas au Conseil constitutionnel de se prononcer sur le défaut de compatibilité d’une disposition législative aux engagements internationaux et européens de la France… et… l’arrêt de la Cour de justice européenne du 26 février 2015 n’a pas fait naître de situations légalement acquises auxquelles seraient susceptibles de porter atteinte les dispositions contestées… qui s’appliquent… à compter du 1er janvier 2016 » (consid. 9).

Ainsi, au gré de cet artifice, les décisions de la cour européenne et de la plus haute instance administrative française deviennent inopérantes.